Les conséquences de l’introduction des big data sur les conceptions actuelles de la médecine personnalisée

  • Le 04 février 2016
    Campus Centre Loire
    MSH Ange-Guépin
    5 allée Jacques Berque - 44000 Nantes
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  • 9h-16h30
  • Plan d'accès

Cette journée est organisée dans le cadre du Programme DataSanté


Problématique

La définition de la notion de médecine personnalisée n’est pas aisée. Le caractère flou et polysémique du concept se prête à de nombreuses interprétations. Toute bonne pratique médicale est par essence « personnalisée », le praticien cherchant toujours à s’adapter au profil de son patient. En quoi cette « personnalisation » aurait-elle donc changé de nature ? L’expression « médecine personnalisée » apparaît ainsi quelque peu singulière et donne légitimement à penser au malade qu’il s’agit d’une médecine sur mesure, s’adressant spécifiquement à lui, d’une prise en charge plus individuelle, plus proche, d’une plus grande empathie à son égard de la part du médecin. En réalité, dans l’acception médicale du concept, il s’agit plutôt de définir des sous-groupes étroits de patients grâce à des biomarqueurs permettant de trouver les thérapeutiques les plus appropriées et donc d’aboutir à une plus grande efficacité médicale avec un taux d’échec limité (Shen B et al, 2010). Ces procédés relèvent plutôt d’une « médecine stratifiée », à l’extrême plutôt que réellement « personnalisée », cette dernière catégorisant les individus selon certaines de leurs caractéristiques (génétiques ou autres) pour élaborer des traitements ciblés selon ces éléments (Trusheim MR et al, 2011).

La médecine personnalisée est issue du transfert progressif vers la clinique de ces progrès scientifiques et technologiques considérables des techniques de séquençage et d’imagerie, initiée dans les années quatre-vingts. Certains lui donnent le terme de « médecine génomique » (McCarthy JJ et al, 2012), d’autres de « médicine de précision » qui fait appel à la multiplication des paramètres d’analyse du patient (Garay JP et al, 2012, Gourraud et al, 2014). Depuis peu est aussi apparu le terme de « médecine systémique », de nature intégrative et holistique. La médecine systémique reprend les approches de biologie systémique intégrant les données en grand nombre, et posant les questions biologiques en mettant l’accent sur le « tout » plutôt que sur les « parties ». Enfin, le terme «médecine personnalisée», ne tient pas compte de l’énorme dimension de cette nouvelle approche qui sera prédictive, préventive, personnalisée et participative, une approche aussi appelée la médecine 4P (Hood L et al, 2012). Cette approche fait elle-même l’objet de recherches intenses (projet européen CASyM).


Questionnements :

A l’image des définitions renouvelées du « gène » à l’ère de la génomique (M Morange), la polysémie du concept de « médecine personnalisée » engendre des difficultés qui doivent être analysées car, dans le cadre de la médecine stratifiée ou de précision, la médecine personnalisée n’est pas la médecine personnelle d’un seul individu mais celle d’un groupe ciblé en fonction du profil médical des individus qui le composent. De plus le contenu même du concept de « médecine personnalisée » évolue rapidement, au fur et à mesure de la disponibilité des données en grand nombre et de leur utilisation dans le cadre de la prise en charge médicale (médecine génomique puis médecine systémique, médecine stratifiée puis médecine de précision, puis médecine 4P..).

Cet axe se propose de reconsidérer les conceptions sur la médecine personnalisée, à la lumière des réponses apportées dans l’axe 1 quant aux modalités de production des big data qui y seront impliquées.

En quoi consistera la notion de « médecine personnalisée» dans le contexte du développement des big data ? La médecine deviendra-t-elle une médecine « biologiquement fondée » ? La médecine personnalisée n’est-elle qu’un changement de paradigme de soins, résultant d’un raisonnement scientifique fondé, grâce aux apports des big data, sur les risques de développer une maladie ? La médecine personnalisée est-elle un outil d’ajustement de la prescription et de la relation thérapeutique aux caractéristiques de la maladie, apportées par les big data, ou de la personne, apportées par les caractéristiques sociales, culturelles et psychiques du malade ? Le fait de détenir plus de précisions biologiques conduit-il automatiquement à plus de personnalisation, au sens de la considération centrale de la personne et non de «ses données biologiques»?

Programme

  • Accueil des participants à partir de 8h30
     
  • 9h15 – Ouverture de la journée
     
  • 9h30 – Jean-Claude Dupont (Université de Picardie) : Origines et commencements de la médecine personnalisée
     
  • 10h15 – Emmanuelle Rial-Sebbag (INSERM, Université de Toulouse) : Enjeux juridiques du ‘big data » en santé :  personnalisation des décisions, dé-personnalisation des données ?
     
  • 11h – Pause
     
  • 11h15 – Elsa Supiot (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) : Regard juridique sur l’utilisation des big data en médecine personnalisée
     
  • 14h  – Catherine Thieblemont (Hôpital Saint-Louis, Paris ) : Apport des big data en hématologie : l’exemple de l’évolution de la prise en charge des lymphomes diffus à grandes cellules B
     
  • 14h45 – Mario Campone (CRCNA et Institut de cancérologie de l’ouest) : Médecine intégrative et limites de la médecine de précision en oncologie
     
  • 15h30 – Pause
     
  • 15h45 – Bruno Falissard (Faculté de Médecine, Paris Sud) : Big data en psychiatrie : comment la technologie peut replacer le sujet au centre des préoccupations
     
  • 16h30 – Pierre Sonigo (BioRad et IEA de Nantes) : Évolution du diagnostic médical : théories et pratiques
Mis à jour le 15 octobre 2020.
https://msh-ange-guepin.univ-nantes.fr/manifestations-scientifiques/les-consequences-de-lintroduction-des-big-data-sur-les-conceptions-actuelles-de-la-medecine-personnalisee