L’écocide – Réflexions et propositions sur une notion en devenir du droit international de l’environnement


Thèse soutenue par

  • Camille TOUTAIN

    Doctorante en Droit international de l’environnement
    Laboratoire Droit et changement social (DCS) UMR CNRS 6297, Nantes Université
    (début de thèse : Octobre 2023)

Sous la direction de :

  • Mme Agathe VAN LANG et Mme Sabrina ROBERT (Nantes Université)

Résumé

L’écocide – Réflexions et propositions sur une notion en devenir du droit international de l’environnement
 

Tout l’objectif de ce projet de recherche est d’apporter une réflexion nouvelle sur la notion d’écocide ainsi que sur ses potentialités dans l’hypothèse de sa reconnaissance en droit international de l’environnement. Il s’agira donc d’analyser la notion d’écocide en l’inscrivant dans une perspective multi-échelle, multidisciplinaire et multi-temporelle. Il s’agira de réaliser une synthèse des réflexions déjà existantes sur l’écocide, ainsi que sur ses différentes consécrations, autant en droit international que dans les droits nationaux, afin de déterminer quelles sont les évolutions envisageables de cette notion porteuse d’une protection pénale internationale de l’environnement. Par ailleurs, ce projet de recherche nous amènera à démontrer que l’écocide est une notion légitimée et soutenue par de nombreux droits fondamentaux (droit de vivre dans un environnement sain, droit à la vie, droit à la santé) et qui entrainera également une évolution, voire même une redéfinition de ces droits[1]. Ce travail de recherche portera également une analyse critique des outils du droit international – tels que la convention internationale par exemple – des régimes juridiques et des institutions à l’échelle internationale afin d’envisager leur pertinence en tant que supports ou obstacles à la reconnaissance de la notion et à sa mise en œuvre.

            L’écocide, notion fondée à la fois sur des considérations philosophiques et politiques, est une transcription en droit d’une nouvelle manière de penser le rapport de l’Homme à la Nature à travers la mise en place d’un régime juridique sanctionnant les actions susceptibles d’entraîner un risque pour la survie de l’espèce humaine. C’est donc ce régime juridique et la possibilité de l’introduire en droit international de l’environnement qu’il s’agira d’étudier. Si l’écocide a déjà fait couler beaucoup d’encre, force est de constater qu’il n’existe aujourd’hui aucun consensus sur la définition de l’écocide, sur les outils à mobiliser pour le reconnaître en droit international ou encore sur le régime juridique à lui associer. À ce titre, certains auteurs proposent leur définition de l’écocide, s’opposant parfois sur certaines caractéristiques de cette infraction notamment sur son élément moral. En effet, alors que l’intentionnalité est mise en avant par Laurent NEYRET[2] comme étant une caractéristique incontestable de l’écocide, l’accent est davantage mis sur l’élément matériel (les conséquences de l’action sur l’environnement) par Valérie CABANES[3]. Par ailleurs, ce projet envisagera l’écocide non pas uniquement comme une notion pénale, mais également comme une notion de droit de la responsabilité civile à travers sa mise en relation avec le préjudice écologique et la compensation écologique. En ce sens, il s’agira, tout d’abord, de s’intéresser à la responsabilité internationale des personnes privées (autant physiques que morales). Il s’agira, en outre, d’envisager l’inscription de l’écocide dans la théorie de la responsabilité internationale de l’État pour fait illicite[4]. Plus globalement, il s’agira d’utiliser le dualisme entre le droit pénal et la responsabilité civile connu en droit français et d’essayer de le transposer à l’échelle internationale pour proposer ainsi la création d’un système de responsabilité environnementale internationale. Le présent projet de thèse vise donc également à insérer l’écocide dans une réflexion plus large sur le fonctionnement du droit international et d’envisager ses possibles évolutions pour assurer une meilleure protection de l’environnement[5].  Entre reconnaissances passées, débats et projets en cours, ainsi que propositions prospectives, l’écocide sera envisagé comme une notion capable de renforcer le droit international de l’environnement et ses applications dans les droits régionaux et nationaux.

 

[1] Cette redéfinition des droits semble marquer selon de nombreux auteurs, le passage des droits de l’Homme aux droits de l’Humanité, portés notamment par Corinne LEPAGE et sa Déclaration des Droits et Devoirs de l’Humanité.

[2] Laurent NEYRET définit l’écocide dans son ouvrage collectif comme « les actes intentionnels commis dans le cadre d’une action généralisée ou systématique et qui porte atteinte à la sûreté de la Terre » (Des écocrimes à l’écocide – Le droit pénal au secours de l’environnement, p 288).

[3] Valérie CABANES porte, avec la fondation Stop Ecocide, une définition de l’écocide formulée comme suit : « on entend par crime d’écocides des actes illicites ou arbitraires commis en connaissance de la réelle probabilité que ces actes causent à l’environnement des dommages graves qui soient étendus ou durables ».

[4] En se basant notamment sur les réflexions de Marie BARDET dans sa thèse portant sur « La notion d’infraction internationale par nature – Essai d’une analyse structurelle ».

[5] Un parallèle est ici à effectuer avec l’œuvre de Philippe SANDS qui dans Retour à Lemberg, envisage le droit international comme un laboratoire de réflexions pour la lutte contre les crimes internationaux à travers l’histoire du génocide et du crime contre l’humanité.

Mis à jour le 03 janvier 2025.